Plus que quelques jours pour organiser les entretiens professionnels

Depuis la loi n° 2014-288 du 5 mars 2014, chaque salarié, quelle que soit la taille de l’entreprise dans laquelle il travaille, doit bénéficier d’un entretien professionnel « ordinaire » tous les 2 ans et d’un entretien professionnel « état des lieux » tous les 6 ans. Cette dernière obligation aurait dû s’appliquer le  7 mars 2020 au plus tard pour les salariés ayant au moins 6 ans d’ancienneté à cette date. Compte tenu de la crise sanitaire, la date limite pour réaliser les entretiens qui devaient se tenir entre le 1erjanvier 2020 et le 30 juin 2021 a été décalée au 30 juin 2021. Focus sur les obligations de l’employeur en matière d’organisation des entretiens professionnels et les sanctions prévues en cas de manquements.

Un petit rappel juridique

 

Les entretiens professionnels ont été instaurés en premier lieu par l’ANI du 14 décembre 2013 relatif à la formation professionnelle puis rendus obligatoires par  la loi du 5 mars 2014 relative à la formation professionnelle, à l’emploi et à la démocratie sociale. Ils sont intégrés au code du travail aux articles L. 6315-1 et suivants.

Le souhait du législateur est de permettre aux salariés d’avoir accès au développement des qualifications et des compétences dans leur emploi et de maintenir leur employabilité sur le marché du travail.

L’entretien professionnel, qu’est que c’est ?

 

Il faut distinguer l’entretien « ordinaire », bisannuel, de l’entretien « état des lieux ».

• l’entretien « ordinaire » :

Cet entretien a pour but d’identifier les projets professionnels du salarié, ses perspectives d’évolution professionnelle, notamment en terme de qualification et d’emploi et ses besoins en formation. Il permet d’impliquer le salarié dans la construction de son parcours. A ce titre il se distingue de l’entretien d’évaluation qui permet de faire le bilan de la période écoulée, de fixer les objectifs professionnels pour la période à venir et les moyens pour y parvenir.

Au cours de cet entretien, l’employeur doit évoquer la validation des acquis par l’expérience (VAE), le dispositif de conseil en évolution professionnelle, les modalités d’activation du compte personnel de formation et son système d’abondement.

• L’entretien « état des lieux » :

Tous les 6 ans, l’entretien professionnel devra faire un état des lieux récapitulatif du parcours du salarié afin de s’assurer qu’il a bénéficié :

Jusqu’au 30 septembre 2021 à des entretiens biennaux professionnels et à d’au moins 2 mesures parmi les suivantes :

  • avoir suivi une action de formation non obligatoire (il s’agit de toutes les actions de formation ; pas de durée minimum)
  • avoir acquis des éléments de certification par la formation ou par une validation des acquis de l’expérience
  • avoir bénéficié d’une progression au plan le salarial ou professionnel
  • s’être vu proposé un abondement de son CPF par l’employeur au moins égal à la moitié des droits acquis

 

À partir du 1er octobre 2021à des entretiens biennaux professionnels et à avoir suivi une action de formation non obligatoire (il s’agit de toutes les actions de formation ; pas de durée minimum)

Périodicité

L’employeur doit organiser les entretiens professionnels « ordinaires » tous les 2 ans et l’entretien professionnel « état des lieux » tous les 6 ans.  Ce délai court à compter de la date de conclusion du contrat, les périodes de suspension n’interrompant pas ce décompte.

L’entretien professionnel « ordinaire » doit être aussi proposé au salarié à l’issue :

  • De certaines absences : congé maternité, congé parental d’éducation, congé de proche aidant, congé sabbatique, période d’activité à temps partiel suite à un congé parental, arrêt longue maladie
  • d’un mandat syndical

 

La loi du 5 mars 2014 étant entrée en vigueur le 7 mars 2014, les employeurs ont en principe organisé depuis cette date des entretiens bisannuels pour les salariés qui remplissaient les conditions d’ancienneté requises. Ils devaient organiser la tenue de l’entretien « état des lieux » le 7 mars 2020 pour les salariés présents depuis au moins 6 ans dans l’entreprise à cette date.

Compte tenu de la crise du Covid 19, la date limite pour tenir ces entretiens a été reportée au 30 juin 2021.

Déroulement

L’entretien est individuel et c’est en principe à l’employeur qu’il incombe de recevoir le salarié.

Il peut néanmoins déléguer les entretiens à un cadre des Ressources Humaines, à un manager ou à un consultant extérieur.

L’entretien doit être formalisé dans un écrit et l’employeur doit en remettre une copie au salarié. La signature de ce dernier n’est pas obligatoire. Cet écrit doit être conservé au minimum 2 ans.

 

Si l’employeur a l’obligation de proposer un entretien au salarié, ce dernier peut le refuser. Le refus du salarié devra cependant être exprimé par écrit. 

 

Obligations de l’employeur

L’article L. 6315-1 du code du travail impose à l’employeur d’informer le salarié qu’il bénéficie tous les 2 ans d’un entretien professionnel à l’occasion de son embauche. Cette information peut figurer dans une clause du contrat de travail, dans un courrier, dans le livret d’accueil ou dans une note de service.

Pour les entreprises d’au moins 50 salariés, dans le cadre de la consultation sur la politique sociale, les conditions de travail et l’emploi, l’employeur doit informer le CSE du nombre de salariés bénéficiaires de l’entretien professionnel « ordinaires » et de l’entretien « états des lieux ».

Sanctions

 

Sanction visées par la loi

Les employeurs d’au moins 50 salariés qui n’ont pas respecté leurs obligations en matière d’entretiens professionnels sont tenus d’abonder, spontanément, le compte personnel de formation des salariés concernés d’un montant de 3.000 Euros. Les pouvoirs publics ont reporté au 30 septembre l’application du mécanisme d’abondement.

S’il ne s’exécute pas spontanément, l’employeur peut être mis en demeure de procéder au versement en cas de contrôle par l’inspection du travail ou par les agents des services régionaux de la formation professionnelle. A défaut de régularisation, l’entreprise devra verser au Trésor Public un montant équivalent à l’insuffisance constatée, majorée de 100% (soit 6.000 Euros par salarié n’ayant pas bénéficié des entretiens et d’une formation non obligatoire).

 

Sanction judiciaire

L’employeur est tenu à une obligation d’adaptation à l’emploi et à celle de veiller à la capacité des salariés à occuper un emploi (art. L. 6321-1 du code du trav).

Les conseils des prud’hommes sanctionnent déjà les employeurs en cas de manquement à cette obligation.

Le cas échéant, la mise en place des entretiens professionnels viendra conforter la position du salarié qui réclame des dommages et intérêts devant la juridiction prud’homale en cas de manquement.

No Comments

Sorry, the comment form is closed at this time.